« C’est incroyable ! Il manqué déjà de quoi manger ! Quelle bande de goinfres.» Bee s’agitait, à la tête du stand de cochonnerie qu’elle avait décidé de tenir lors du concert organisé par la ville. Après tout, en citoyenne modèle et impliquée dans la vie de sa ville, elle ne manquait jamais aucun événement, et encore moins les concerts. Il fallait l’avouer, elle avait un gros faible pour les musiciens. Elle les trouvait tellement mignons et torturés. Et puis ,c’était des amans divins. Enfin, elle ne venait pas que pour ça, loin de là. Elle aimait la musique, et surtout , ce genre d’événements permettait toujours de discuter avec des gens qu’on ne voyait pas assez souvent. Et puis, c’était une façon de s’amuser. Et ça, elle ne disait jamais non. Elle souffla et lança un regard à l’ado qui se tenait appuyée contre un arbre, concentrée sur son portable, au lieu de l’aider, comme il se le devait. « Et toi ! Tu veux pas aller me chercher de la bouffe dans la réserve ? » L’ado maigrichonne releva la tête et lui lança un regard perplexe. « La réserve ? Quelle réserve ? » Bridget la fusilla du regard mais conserva malgré tout un sourire ravi et posa ses mains sur les hanches. « Tu sais quoi ? Je vais y aller. Tiens le stand. Et range moi ce téléphone. On est pas ici pour envoyer des SMS.» Elle lui fit un sourire ironique avant de quitter le stand, s’assurant bien sûr que l’ado prenne sa place. Elle avait décidé de s’occuper de la bière, citronnade et amuse-gueule, mais les gens avaient déjà dévalisé le stock. En même temps, le concert avait déjà commencé depuis une bonne demi-heure. Tout le monde semblait s’amuser, et elle se promit qu’après avoir ramené un peu de bouffe, elle laisserait son « employée » gérer un peu le stand à sa place pour profiter un peu de la soirée. Après tout, elle avait le droit de s’amuser aussi, non ? Elle fit le tour de la scène, lançant un regard aux musicien, et s’éloigna de l’animation pour gagner l’endroit isolé où se tenait la réserve. Elle avait tout mis dedans histoire d’éviter les vols et autre. Elle n’avait plus qu’à récupérer quelques paquets de chips, quelques bonbons et autres. Elle se figea soudain en pénétrant dans la réserve. Du bruit se faisait entendre. Un animal avait-il réussi à pénétrer ici et voler ses réserves ? « Il y a quelqu’un ? »

« Et puis tu vois, après on est allés boire un verre et puis tu comprends, j'suis pas une fille facile, alors je lui ai dit que j'allais pas coucher avec lui ! ». « Ah ouais... ». « Et puis après, il m'a dit qu'il en avait rien à faire et du coup, il m'a frappé, il m'a violé et puis tu vois c'est embêtant parce que je suis enceinte alors je sais pas quoi faire ! ». « Ah ouais, c'est cool ! »... une, deux, trois secondes. « PUTAIN REESE T'AS RIEN ECOUTE A CE QUE JE T'AI DIT ! ». Oui bon, j'avoue, j'écoutais pas ce qu'elle me disait, mais j'étais innocente, c'était pas de ma faute ! « Et puis lâche ton putain de téléphone, c'est chiant là ! En plus le concert va commencer ! ». Bon, elle n'avait pas tord, il fallait franchement que j'arrête d'envoyer des messages à Ian si je voulais profiter de ma meilleure amie et du concert... mais au final, je voyais Amy tous les jours et la country ça n'avait jamais été mon truc. « Rejoint-moi dans la réserve. », m'avait alors envoyé Ian et c'était le sourire aux lèvres que j'avais trouvé la première excuse bidon pour m'éclipser et le rejoindre au plus vite.
« Ian, t'es là ? ». La pièce était assez sombre, entrecoupée par de nombreuses étagères remplies de nourritures et bocaux. Je tournais un peu, jusqu'au moment où, en ayant marre, je soupirais. « Allez, sors de ta ca./ », pas le temps de répondre que je sentais deux mains se poser sur mes hanches et me retourner. A peine le visage de Ian dans mon champ de vision que ses lèvres se posaient sur les miennes me plaquant à l'étagère derrière moi. Je souriais contre ses lippes, ne pouvant résister à l'appel de son corps alors qu'il s'approchaient encore plus de moi et que je passais mes bras autour de sa nuque. Au final, je ne sais pas vraiment combien de temps on est restés là, à nous embrasser dans un coin sombre de la réserve... Tout ce que je sais, c'est que le bruit de la porte me fit sursauter et qu'une voix bien familière se fit entendre. « Il y a quelqu'un ? ». Merde ! Bridget ! J'adorais cette fille, mais elle était également la meilleure amie de ma sœur et si elle nous surprenait dans une position aussi compromettante, elle allait surement le dire à ma sœur et Aspen allait se foutre de ma tronche jusqu'à la fin des temps. A peine Bridget eut-elle le temps de se tourner vers nous que j'éloignais Ian, tentant de reprendre mon souffle et de paraître la plus naturelle possible. « Et tu vois, là, c'est l'étagère des légumes... parce que c'est important de manger des légumes, tu comprends ? Ah salut Bee, ça va la vie ? », ouais, bon, c'était loupé, on était complètement grillés et les lèvres rougies de Ian par notre chaleureux échange en témoignait aisément.  

« Ian t’es avec nous ? » « Hein ? » je levais les yeux de mon téléphone afin de remarquer quatre pair d’yeux me scruter avec un air moqueur tandis que j’appuyais sur la touche ‘envoyer’. Ce n’était pas mon genre d’être sans arrêt sur mon téléphone, mais lorsque c’était Reese qui m’envoyait des messages - même si c’était pour se dire des choses peu intéressante comme la folle envie de se retrouver seuls - j’étais incapable de ne pas sourire comme un idiot et de m’empresser de lui répondre. Je marmonnais de brève excuses auprès de mes compatriotes tandis que nous étions au Spring Good, au fond de la salle, attendant que le groupe se mette enfin à jouer. Il semblerait que Spring Garden s’était réuni ce soir afin d’écouter de la musique country. A vrai dire, c’était simplement mon excuse afin de retrouver mes amis autour d’une bière. Je savais que Reese était présente aussi avec une de ses amies et ainsi, nous faisions en sorte de ne pas être collés à l’autre, en tout cas, pas physiquement, car mon portable ne cessait de vibrer dans ma poche. Je n’écoutais que très peu la conversation de mes amis et ils semblaient pris dans un débat houleux afin de déterminer qui de l’équipe de l’université d’Alabama ou d’Auburn était la meilleure. Je décidais que c’était le moment opportun de s’éclipser, ne désirant pas participer au débat qui se terminerait sûrement dans les hurlements et dans des paris sur le prochain match. J’envoyais un message à Reese afin qu’elle me rejoigne dans la réserve afin de trouver un endroit tranquille où on pourrait se voir. « Je reviens » lançais-je, mais je crois qu’aucun d’eux ne m’avait entendu ce qui me fis quelque peu sourire. Je me faufilais dans la réserve, attendant patiemment entre deux étagères jusqu’à ce que la belle brune apparaisse, elle ne m’avait pas vu et me tournait le dos. Tandis qu’elle me cherchait, je m’approchais doucement d’elle avant de poser mes mains sur ses hanches et de la tourner vers moi. Aussitôt, nos lèvres se rencontraient, il fallait que j’avoue qu’elle m’avait manqué et sans m’en rendre compte, la belle fut plaquée contre l’une des étagères, je me laissais enivrer par ce baiser jusqu’à ce qu’une voix féminine s’élève. Reese me poussait en arrière, faisant semblant de m’expliquer l’importance des légumes, j’avais envie de rire face à ce jeu très peu convainquant et lorsque je me tournais vers la dénommée Bee, je me mordais la lèvre tandis que je sentais le rouge me monter aux joues. Je me contentais d’un bref « Bonsoir » et j’étais un peu plus inquiet que Reese puisse la connaître.  

La blonde s’était figée en pénétrant dans la réserve, alertée par un bruit suspect qui prouvait qu’elle n’était pas seule. Elle lança un rapide appel, histoire de vérifier, avançant un peu plus, lorsque soudain elle entendit une voix sortir de l’obscurité. « Et tu vois, là, c'est l'étagère des légumes... parce que c'est important de manger des légumes, tu comprends ? Ah salut Bee, ça va la vie ? » Une brune qu’elle connaissait plus que bien se tenait maintenant devant elle, un jeune homme derrière elle qui murmura un rapide bonsoir. Bridget les regarda tous les deux, attardant son regard sur la brunette qui avait rougi en murmurant ces quelques mots. « Reese, salut ! » Elle ne put s’empêcher d’esquisser un sourire malicieux. Il n’y avait aucun doute que Reese n’était pas en train de lui faire le tour du propriétaire de la réserve, clairement. Surtout vu les lèvres rougies du jeune homme. Aussi rouges que ses joues. « A ce que je vois, le concert vous plaît ? » Elle se mordilla la lèvre et haussa les épaules avant de reprendre : « Tiens, Reese, puisque tu sembles connaître cette réserve comme ta poche, sais-tu où sont les provisions ? Chips, bonbons, tout ça ? On commence à manquer là-bas.» Elle avait retrouvé son sérieux, elle savait très bien où se trouvait tout ça puisqu’elle avait tout entreposé elle-même dans la journée. Mais ça l’amusait de jouer ce petit jeu. Elle adorait Reese, et elle se doutait qu’à cet instant, la brune aurait voulu disparaître sous terre.

« Reese, salut ! », on était grillés, complètement grillés et je savais que je devais probablement être rouge comme une tomate. Je lâchais un rire crispé, lançant un bref coup d’œil à Ian, qui m'évitait soigneusement du regard, probablement aussi gêné que moi. Super. « A ce que je vois, le concert vous plaît ? ». En d'autres circonstances, ça m'aurait surement bien fait rire, mais j'avoue que sur le coup, j'étais vraiment au fond du trou. Non, mais sérieusement, quelle honte ! Faudrait vraiment penser à soigner mes hormones. C'était la deuxième fois qu'on se faisait surprendre et ça commençait sincèrement à bien faire ! Ne sachant quoi répondre, je restais muette comme une carpe, avant que Bee n'ouvre une nouvelle fois la bouche. « Tiens, Reese, puisque tu sembles connaître cette réserve comme ta poche, sais-tu où sont les provisions ? Chips, bonbons, tout ça ? On commence à manquer là-bas.». J'ouvrais de grands yeux. Okay, j'étais vraiment dans la merde et j'avais beau lancer des coups d'oeil furtifs autour de moi, impossible de savoir où se trouvaient les chips. « Euuuuh ouais... c'est par là bas... », lâchais-je d'une petite voix, désignant un coin au hasard de la réserve... avant d'ouvrir de nouveau la bouche. « Bon, tu m'excuses, je peux pas rester pour t'aider à chercher, j'ai euh... j'ai des trucs à faire... ailleurs... pas dans la réserve quoi... d'ailleurs Ian, tu viens ? .... j'ai... un truc super important à te montrer ! ». Et ni une, ni deux, me voilà à me précipiter sur la seule et unique porte menant hors de la pièce... Je tirais, poussais sur la poignet, mais... rien. Elle était fermée. Complètement et irrémédiablement fermée. « Euuuuuh, quelqu'un aurait la clef ? », demandais-je, veillant bien à ne pas paniquer.

Je crois qu’on était maudit et complètement grillés. Cette blonde qui répondait au nom de Bee, c’était sûrement un surnom et j’avais le souvenir de l’avoir déjà croisé plusieurs fois, mais impossible de me souvenir de son véritable prénom. Tout ce que je me souvenais, c’est qu’elle était souvent en compagnie de la grande soeur de Reese, Aspen et il semblerait que ces deux là étaient maîtresse en matière de nous surprendre dans des situations gênantes. Remarquant son petit sourire, je me doutais que la blonde savait très bien ce qu’on faisais dans la réserve et ce n’était pas pour inspecter l’étagère des légumes. Bee semblait s’amuser de la situation en demandant à Reese de lui montrer où étaient rangés les chips et autres friandises. Voyant l’air penaud que prenais la belle brune, je lui indiquais discrètement où ils se trouvaient afin qu’elle ne se couvre pas de ridicule. Je demeurais silencieux, gêné, ne sachant pas quoi dire, car je savais que si j’ouvrais la bouche, j’allais m’enfoncer. Je fus soulagé tandis que Reese essayait de nous sauver en se dirigeant vers la porte de sortir, prétendant devoir me montrer quelque chose. Or, la porte se trouvait fermé. C’est quoi ça une mauvaise blague ? On va rester calme tandis que je voyais la brune essayer de ne pas céder à la panique « Tu l’aurais peut-être étant donné que tu es  la dernière à être rentrée ? » demandais-je à Bee, espérant sérieusement qu’elle la sorte miraculeusement de sa poche afin de nous sauver de ce moment gênant.